samedi 4 janvier 2014

I have no words and 
I must to design it 
Greg Costikyan

355 South End Ave #2B
New York, NY 10280, USA
(646) 489–8609


Greg Costikyan est surtout connu dans le monde du jeu. Créateur, consultant, théoricien ludique, il a mis ses talents au service tant du jeu de plateau, jeu de rôle ou encore du jeu vidéo. 
Il a crée, en 1984, un jeu intitulé Paranoïa, dont l’action se déroule dans un complexe, réputé hermétiquement clos, dirigé par un ordinateur psychopathe, où des clones pourchassent tous les éléments subversifs qui ne suivent pas l’orthodoxie décrétée par le grand chef.

Je n'ai pas les mots, et je dois le concevoir

La première fois que j'ai entendu parler du « Gameplay », c'était lors de mon entretien d'embauche chez Atari, en 1982. Ce terme a été employé par une personne qui venait de jouer à Zaxxon. Elle a déclaré : 
« Ce jeu a un très bon gameplay ». 
Zaxxon
Depuis lors, le terme est devenu omniprésent dans le domaine du jeu. Les gens parlent de gameplay, comme s'il s'agissait parfois de magie, de choses mystiques que tout jeu doit posséder. Les game designers aiment se décrire comme « des gens qui comprennent le gameplay », contrairement aux codeurs ou aux artistes. 

En fait, très peu d'entre eux décrivent le gameplay. Ce terme est une nébuleuse et est donc assez inutile sans explication. Affirmer « Il y a un bon gameplay » est sans doute aussi utile que de dire « c'est un bon livre ». 

Dire qu'une réalisation est « bonne » ne nous aide pas à comprendre en quoi elle est bonne, quel plaisir elle procure, et surtout comment concevoir un bon gameplay.

Le jeu comme moyen plastique

Le jeu est un médium incroyable, qui s'adapte à toutes les technologies, du Néolithique à la Haute Technologie. Il y a une incroyable variété de jeux qui ont été développés au fil des ans. Jeux de plateau, wargames, RPG sur ordinateur et console, MMRPOG, jeux de cartes, jeux miniatures, simulateurs de vol, de conduite, jeu de danse, de stratégie en 3D temps réel, jeux d'argent, paintball, sports, courses de chevaux... 

Ce sont tous des jeux. Mais comment faire pour les définir quand ils occupent un champ aussi large? Qu'est ce qui fait que tous ces jeux sont intéressants? Après analyse, ont-ils ne serait ce qu'une chose en commun?

Pour comprendre les jeux, pour en parler intelligemment, et pour en concevoir un meilleur que les autres, nous avons besoin de comprendre ce qu'est un jeu, et définir le gameplay avec des termes identifiables. En résumé, nous avons besoin de définir un vocabulaire critique pour les jeux.

Interaction

En 1982, Chris Crawford a publié un des rares livres sur la conception de jeu : « The Art Of Computer Game Design ». Dans son livre, Chris Crawford oppose ce qu'il appelle les jeux, avec les puzzles. Les puzzles sont statiques, avec une structure logique à résoudre.

En revanche, avec l'aide d'indices, le jeu n'est pas statique, mais évolue en fonction des actions du joueur. Certaines énigmes sont cependant affirmées. Personne n'appellera des mots croisés un « jeu ». 

Mais selon Crawford, certains jeux sont un véritable casse-tête chinois. Le jeu Zork par exemple.

L'unique objectif de ce jeu est de résoudre un puzzle, en trouvant des objets et leurs utilisations. Ces objets modifient l'état du jeu, en fonction des actions du joueur. Il n'y a rien qui s'oppose au joueur, pas de jeu de rôle, et il n'y a pas d'interface utilisateur avec accès aux ressources.

L'objectif à atteindre est juste de terminer le puzzle.

Je pense que Crawford surestime ce jeu. Ce jeu d'aventure (Zork) appartient plus à la catégorie du puzzle. Il change d'état en réponse aux actions du joueur. Vous vous trouvez dans un nouvel endroit, et finir un puzzle vous permettra d'accéder à de nouveaux indices. 

Dans les jeux rétro, Zork fait partie des premiers jeux informatiques qui ont eu du succès. Interaction entre les personnages, développement de l'histoire sont autant d'éléments importants qui font de Zork un jeu, avec une place importante pour le puzzle.

Presque tous les jeux contiennent une partie de puzzle à résoudre. Même un jeu de stratégie militaire exigera des joueurs de résoudre un énigme. Par exemple, celle de faire une attaque optimale avec un nombre de soldats défini. 

A partir du moment où un jeu implique de prendre un type de décision, ou bien de faire un compromis entre différents types de ressources, le joueur gérera ça de la même façon que des pièces de puzzle, en trouvant la solution optimale.

Même dans un jeu de tir à la première personne (FPS), le joueur cherchera à utiliser un maximum de protection, et de tirer profit du terrain. Vous ne pourrez pas dire pour autant que le FPS est un puzzle.

Cependant, Crawford fait une distinction intéressante : un puzzle est statique, et un jeu est interactif.

Cela devrait interpeller certains lecteurs : « Interactif », n'est ce pas un terme qui se réfère à des supports informatiques? Et n'y a t-il pas des jeux « non vidéo », comme le Monopoly (de Charles Darrow), qui sont interactifs?

C'est évident : vous choisissez ou non d'acheter une propriété, lorsque vous atterrissez sur une case qui vous donne cette possibilité. L'état du jeu changera en fonction de votre décision. 

Le jeu interagit donc avec les joueurs. Les joueurs aussi interagissent les uns avec les autres. La structure du Game Design du Monopoly est donc interactive. Cela est vrai pour chaque partie. Si ce n'était pas le cas, alors ce serait un casse-tête, et pas un jeu.

Il y a quelques temps, on m'a demandé de donner un cours sur les jeux interactifs. J'ai précédemment entendu ce terme utilisé par des gens qui pensaient que nous parlerions du design des jeux électroniques : jeux pour ordinateur, consoles, et arcades. Mais tous les jeux sont interactifs.

Objectifs

Mais alors : que signifie vraiment le terme interaction? Pas grand chose. En fait, un interrupteur est interactif. Vous appuyez dessus, la lumière s'allume, ou s'éteint. C'est interactif. 

Un interrupteur n'est pas un jeu, bien évidemment, L'interaction n'a aucune valeur de jeu. De plus, l'interaction doit avoir une fin.

Supposons que nous ayons un élément interactif. A un moment donné, nous sommes confrontés à un choix. A ou B. 

Ce choix modifiera l'état du jeu. Mais qu'est ce qui fait que le choix A est meilleur que le choix B? B est peut être mieux que A à certains moments du jeu et pas à d'autres. Quels facteurs seront pris en compte dans ce choix? Quelles ressources doivent être gérées dans ce choix? Quel est le but éventuel?
Extrait de http://fr.flossmanuals.net/blender-pour-le-jeu-video/
Alors, nous ne sommes pas en train de parler d'interaction. Nous parlons à présent de prise de décision : l'interaction avec une proposition.

Ce qui fait l'interaction avec un jeu, c'est le besoin de prendre une décision. 

Prenons à titre d'exemple, les Échecs. Ce jeu a peu d'éléments qui en font un jeu attrayant. Aucune simulation, aucun de jeu de rôle, et très peu de couleurs. 

En revanche, sa force est qu'il vous oblige à prendre des décisions. Les règles sont limitées, les objectifs et la façon d'obtenir la victoire clairement énoncés. Ce jeu vous oblige à anticiper plusieurs coups d'avance. Ce qui en fait un excellent jeu dans la prise de décision, et qui explique son succès.

La prise de décision est peut être une notion trop forte. Vous pouvez tout à fait penser que les ÉchecsCivilization, ou Donjons & Dragons sont des jeux basés sur la prise de décision. Mais dans des jeux où le déplacement est plus rapide, comme Quake ou Mariola victoire dépend plus de la rapidité à répondre, et à la gestion de l'interface, plutôt qu'à la planification prudente. 
Deus Ex Machina Revolution
Il y a toujours des décisions à prendre, mais l'interaction est moins cérébrale, dépendante de la qualité de coordination du moteur, et de l'entrainement du joueur. Pour autant, même pour les jeux d'action et d'habileté, l'interaction est volontaire.

Que fait le joueur dans un jeu? Certaines choses dépendent du segment (ndt : pc, consoles, smartphones...). Dans certains jeux, on lance des dés, ou on échange avec des amis. Dans d'autres, on se déplace avec le clavier, ou on tire avec une manette. Mais chaque jeu répond d'une manière calculée, pour aider le joueur à atteindre ses objectifs. A tout moment, le joueur peut considérer l'état du jeu. 

Cela peut être ce qu'il voit à l'écran, ou ce que lui dit le Maître de Jeu. Cela peut être aussi la position des pièce sur l'échiquier, ou l'évaluation de la quantité de jetons (ressources disponibles), lutter contre son/ses adversaires, et tenter de répondre au mieux pour atteindre son objectif.

Chaque jeu possède t-il des objectifs? La plupart oui, ont une condition de victoire définie, ou un ensemble de conditions de victoire (à l'instar du terme employé dans les wargames).

L'opération de base que nous faisons avec les jeux est d'accepter de se comporter comme si la victoire était importante, pour laisser l'objectif guider notre comportement. Sans cet engagement fondamental, le jeu devient inutile. 

Mais certains jeux n'ont pas d'objectifs explicites.
Il y a quelques années, Will Wright dans une conférence adressée aux développeurs de jeux (Game Developers Conference), y décrit SimCity, qu'il a conçu comme un « jeu/jouet ». Il utilisa le ballon pour illustrer son idée : SimCity offre la possibilité de tester plusieurs comportements. Vous pouvez les accentuer, les contourner, ou les atténuer.
SimCity
Si vous le désirez, vous pouvez l'utiliser dans un jeu de basket, ou de football. Mais le jeu n'est pas inhérent au jouet. C'est un nombre d'objectifs définis par le joueur, qui prend appui sur ce jouet.

Tout à fait l'esprit de SimCity.

Comme beaucoup de jeu vidéo, il crée un monde que le joueur peut manipuler. Mais contrairement à la plupart des jeux, il ne donne pas d'objectifs explicites à atteindre. 

Oh, vous pouvez toujours en choisir un : construire une ville sans passer par la phase bidonville, ou en fonder une autre qui se base uniquement sur le transport en commun. Mais SimCity n'a pas d'objectif à atteindre, ni de conditions pour atteindre une victoire. C'est un « jeu/jouet ».

C'est vrai que dans un sens, cela peut être un échec pour le jeu. D'autres produits crée par Will Wright, offrent d'autres versions contrastées, comme SimEarth, qui est un modèle de l'évolution sur Terre. Elle commence avec la présence de quelques cellules, qui se répliquent dans l'océan, comme à l'aube de la vie.

Au fil du temps, la vie évolue et des créatures plus complexes apparaissent, s'établissant sur la terre, se reproduisant, s'adaptant aux changements de l'environnement, et faisant parfois face à des catastrophes. Le jeu se termine lorsque l'évolution de la vie a atteint l'intelligence. SimEarth est sortie en 1990. Le succès ne sera pas au rendez vous. 

Alors que SimCity est devenu un hit, et régulièrement mis à jour, SimEarth a disparu. Pourquoi? Ces deux jeux fournissent au joueur les mêmes types de paramètres à manipuler, et quelques trucs à faire. Ces deux jeux vous permettent d'être dans l'observation, ou de faire autre chose en même temps. 

Contrairement à la plupart des jeux, qui exigent que vous soyez constamment attentif. Mais il y a une différence fondamentale entre les deux. SimCity supporte un large choix d'objectifs, SimEarth, non. SimEarth n'a aucun but. A moins que vous paramétriez la vie en la rendant plus complexe, l'intelligence va se développer et le jeu sera fini.

Jouer à SimEarth, c'est comme jouer avec un interrupteur. Alors que SimCity vous permet de choisir quel type de ville vous voulez développer, quels types d'éléments vous voulez déployer pour rendre votre ville plus stable, et pourquoi pas, tenter de bâtir une cité utopique. 

Vous pouvez tenter de construire une ville sans centre ville, avec des habitants qui se déplacent essentiellement avec leurs véhicules. Vous pouvez également créer une ville avec un centre ville, des transports en commun et peu d'industries lourdes. Vous pouvez essayer un million de choses. Et c'est toujours intéressant de jouer, car vous aurez toujours quelque chose de nouveau à tester.

Will Wright a raison sur un point : SimCity n'est, d'une certaine façon, pas un jeu, mais un simple jouet. 

Mais telle qu'une balle, c'est un très bon jouet. Il est sensible aux comportements du joueur, il est orienté sur les objectifs, malgré qu'il n'y ai pas de conditions définies pour atteindre une victoire. SimCity fonctionne car il permet aux joueurs de choisir leurs propres objectifs, et supporte une grande variétés d'objectifs. 

SimCity est un jeu, du moins quand un joueur l'utilise comme tel. SimEarth, malgré ses similitudes, n'en est pas un. SimCity est loin d'être le seule jeu dont les objectifs ne sont pas définis. Et ceci est valable également pour les RPG, jeu on line, de courses ou d'autres jeux inspirés graphiquement, comme EverQuest ou Ultima Online.

Dans les RPG ou les jeux de réalité virtuel (MUD), vous contrôlez un seul personnage dans un monde imaginaire. Vous rencontrez souvent d'autres joueurs, vous pouvez former un groupe et travailler ensemble. Les PNJ sont eux même contrôlés par le Maître de Jeu, ou l'AI.
Pip-boy 3000 (Personal Information Processor)
Dans ces deux types de jeux, la progression des personnages est un concept clé. Votre personnage peut devenir plus puissant, obtenir des bonus, des compétences, des manas, des armes, peu importe. Dans de nombreux jeux, la puissance est acquise par la destruction de choses (ville, ennemis...). C'est en tout cas vrai pour Donjons & Dragons et EverQuest

Dans d'autres jeux, la puissance est obtenue par des quêtes, des objectifs à atteindre au cours de l'histoire, ou en utilisant les bonnes compétences au bon moment (lors de combats par exemple). Quel que soit le mécanisme, la progression du personnage est fondamentale.

Nous avons déjà un objectif ici, qui est que le joueur veut faire progresser son personnage.

Dans les MUDs, les RPG, les jeux multijoueurs, vous pouvez établir une relation suivie avec d'autres joueurs. Vous découvrez petit à petit l'univers, le monde, et immanquablement, vous découvrez de nouvelles quêtes, et de nouveaux objectifs à atteindre. 

Un de vos amis a peut être une mission à accomplir et sans doute, y aura t-il une possibilité pour vous de devenir plus puissant en l'aidant. En créant des connections avec les autres joueurs, l'AI ou le Maître de Jeu apportera de nouveaux objectifs, au fur et à mesure du déroulement de la partie.

Il arrive parfois que dans ce type de jeu les joueurs se sentent perdus. Ils ne sont pas certains de ce qu'il y a a faire, où aller, comment atteindre un autre niveau, ou simplement avoir la motivation suffisante pour atteindre le niveau supérieur. 

En tant que joueur de rôle, il y a eu des moments où je me suis ennuyé, quand mon personnage était dans une auberge avec d'autres joueurs, à discuter de ce qu'il fallait faire.

Dans les MUDs, j'ai pu ressentir de l'ennui, avec l'envie d'aller voire au delà de l'environnement si il n'y avait pas d'autres choses à faire. Qu'est ce qu'il se passe, au delà de la zone de jeu? Ceci est le résultat d'un manque d'objectifs clairement définis dans ces jeux. Si celui de faire progresser son personnage est énoncé, ça n'est pas toujours suffisant. Je vais alors rechercher un autre but à atteindre, en d'autres termes, le jeu m'ennuie.

Dans un RPG, le Maître de Jeu peut perdre l'attention des joueurs. Un bon Maître de Jeu saura quand les joueurs vont commencer à déconnecter du jeu. Et il agira en conséquences, en lançant par exemple une attaque d'orques sur l'auberge. Cela donnera aux joueurs l'occasion de se battre et sauver leur peau. L'instinct de vie est donc un bon objectif.

Dans le cas d'un MUD, c'est parce que la conception ne peut pas soutenir un certain nombre d'objectifs (tuer des monstres et récupérer leurs trésors fini par ne plus amuser) qu'il sera ennuyeux. Ajouter d'autres options comme la progression de votre personnage et le jeu sera grandement plus intéressant.

Dans le RPG ou le MUD, les joueurs choisissent finalement leurs propres objectifs. Le travail du jeu n'étant pas de fournir des objectifs explicites, mais plutôt de permettre de les diversifier. 

Aux joueurs alors de trouver celui qui l'intéresse. Il ne s'agit pas non plus de détourner les objectifs. Les objectifs sont aussi fondamentaux dans un MUD qu'un RPG, dans la mesure ou ils définissent leurs styles de jeu, qui définissent clairement les conditions pour accéder à la victoire. 

En effet, quand les joueurs sentent qu'il n'y a pas d'objectifs à atteindre, ils commencent à s'impatienter. Si les jeux interactifs contiennent des directives pour atteindre des objectifs, ces objectifs seuls, ne sont pas suffisants pour faire le jeu.

Le combat


Parfois, les jeux de combats sont définis comme agressifs, et donc mauvais. Il y a les gagnants et les perdants. Alors que nous sommes supposé soutenir et protéger l'autre. Pourquoi ne pourrions nous pas avoir un jeu de « coopération »?
Street Fighter
Généralement, les jeux de coopération ressemblent aux jeux de ballons. Ah oui, ça pourrait être fun. « Je vais te faire une passe pour faire gagner notre équipe».
Mais pourrions nous parler de compétition?

Non, nous voulons parler de combat.

Un jeu nommé Plucky Little England simule la situation vécue par le Royaume-Uni après la capitulation de la France face au nazisme pendant la seconde guerre mondiale. Vos objectifs A ou B :

A – Capituler (comme le gouvernement français)
B – Affronter Adolf Hitler! L'Angleterre ne sera jamais esclave de personne!

Que choisissez-vous? Vous avez choisi B? Ouah! Excellent choix! Toutes nos félicitations, vous avez gagné! Quelle satisfaction! Aaah, le frisson de la victoire.... Mais il n'y a aucun frisson, bien sur. C'était trop facile, et ça a cruellement manqué de combats.

La concurrence est un moyen de créer un jeu de combat. Dans un jeu en face à face avec deux joueurs, vous devez lutter contre votre adversaire, et le jeu est une concurrence direct. C'est le premier stade pour faire un jeu de combat. Rien n'est plus sournois et plus difficile a surmonter qu'un adversaire déterminé à vous éliminer. 

Le jeu d’Échecs est très fort sur ce point car justement, chaque pensée et chaque geste sont dictés par la nécessité d'anticiper et de traiter en fonction de la pensée de l'adversaire. Il n'y a que la compétition comme moteur dans le jeu d'échecs, mais elle est suffisante pour en faire un jeu de combat.

Mais la compétition n'est pas le seul moyen de déclencher un affrontement.

Faisons une analogie avec Le Livre dont vous êtes le Héros. Le modèle standard narratif fonctionne ainsi : Votre personnage a une quête. Il fait face à un obstacle. Il doit faire un choix entre A, B, C et D. Il tente A, puis B, etc... En fait, il combat avec chacune des propositions, pour finalement contourner le plus gros et dernier obstacle, et avoir la satisfaction du problème résolu. Ces obstacles sont-ils nécessairement des adversaires, des méchants, des ennemis?

Non, mais un ennemi fait un très bon premier obstacle. Mais les forces de la nature, les belles-mères acariâtres, le crash d'un disque dur, ou le sentiment d'être démuni peuvent être de bons obstacles également.

Dans un jeu de rôle comme Donjons & Dragons, vous êtes assis autour d'une table avec une demi douzaine de joueurs et un Maître de Jeu. Chaque joueur a un personnage bien spécifique, et votre objectif est de faire progresser votre personnage. Il se peut aussi qu'un bon nombre d'entre vous aient d'autres objectifs à atteindre.


De part sa nature, le RPG va vous amener à collaborer avec les autres joueurs. Du moins, en vertu de certains objectifs communs. Il n'y a généralement pas d'adversaires direct. Bien qu'il puisse y avoir des tensions, lorsqu'il s'agit de partager un trésor, par exemple.


Que prévois D&D en cas de combat? Généralement, les combats ont lieu entre PNJ, monstres, et les joueurs. Vos personnages vont vivre l'aventure ensemble. L'aventure est la colonne vertébrale de l'intrigue, avec une série de rencontres possibles, et de récompenses. 

Vous passez un peu de temps à tuer des monstres pour leur voler leurs trésors, interagir avec les PNJ, résoudre des intrigues, qui apporteront le lot de satisfactions aux joueurs.. C'est la base du mode de fonctionnement de D&D

Le cadre des combats se trouve dans différents éléments comme : l'opposition entre les monstres et les PNJ, l'exploration du monde, de l'histoire, les pièges ou énigmes posées dans le monde physique du jeu, ou encore dans la résolution de conflits dans la dimension sociale du jeu. 

Un RPG a un Maître du Jeu qui se prononcera sur les règles, jouera les PNJ, décrira le monde et les grandes lignes de l'histoire, d'une façon satisfaisante pour que le joueur puisse s'immerger dans l'univers. Il sert en quelque sorte d'arbitre et de dramaturge.

Les RPG sont donc flexibles, et c'est au Maître de Jeu d'en exploiter le système pour dynamiser son jeu. Les RPG n'ont pas besoin d'adversaires parmi des autres joueurs, car il y a suffisamment d'obstacles à créer pour garder l'attention des joueurs. 

Accéder au pouvoir, ou accomplir d'autres réalisations, quels que soient vos objectifs, se sera toujours un combat. 

Si ce n'est pas le cas, alors c'est que le Maître de Jeu n'a pas fait son job. Ce dernier a un tel contrôle sur les événements du jeu, qu'il doit s'assurer que les joueurs sont constamment en train de lutter pour rester dans l'histoire.

Dans les jeux d'aventure, comme Grim Fandango, le combat n'est pas un élément clé pour progresser dans le jeu. Vous n'êtes ni en lutte contre d'autres joueurs réels, ni en train de combattre des ennemis. 

Les jeux d'aventure sont essentiellement des histoires animées séparées, liées entre elles par des énigmes, mais la plupart des scènes d'animations sont jouées par le moteur du jeu lui même. Il s'agit de scènes cinématiques qui se déclenchent en fonction des actions du joueur. 

L'histoire n'est pas non plus tout à fait linéaire. A chaque niveau dans le jeu, le joueur a la possibilité de se balader ou bon lui semble, interagir avec plusieurs personnages, et a la possibilité de résoudre plusieurs énigmes. Certaines énigmes sont directement liées à d'autres, et nécessitent d'être résolu dans un ordre précis, et d'autres non. 

En fin de compte, la possibilité de résoudre des énigmes dans un espace clos, permet au joueur de transiter vers le prochain espace de jeu et aller résoudre d'autres énigmes.

Vous pouvez, si vous le souhaitez, jouer à un jeu d'aventure uniquement pour l'histoire. Et en effet, quelques jeux sont véritablement intéressant juste pour leur histoire, et c'est le cas de Grim Fandango. Vous pouvez également trouver un ouvrage ou télécharger la solution des énigmes sur le web, et ne vous intéresser ainsi qu'à l'histoire. 

Alors pourquoi ne pas faire juste une histoire interactive, si on peut se débarrasser des énigmes? Tout d'abord, vous allez considérablement réduire la durée de vie de votre jeu, et je ne me vois pas personnellement investir 50 dollars pour 4 heures de divertissement, mais peu importe. Sans énigmes, plus de jeu. 

S'il n'y a plus d'affrontement, il n'y a plus de jeu non plus. Ce qui fait de Grim Fandango un jeu, c'est justement ses énigmes. 

Les développeurs de jeu sur console sont constamment aux prises avec la notion de lutte. Ils savent que si le challenge est trop dur à relever, le joueur sera frustré. En revanche, si les énigmes sont trop simple, alors le joueur va s'ennuyer. 

Les développeurs vont donc passer un temps considérable à tester l'équilibre du jeu. Lorsque cela sera possible, ils ajouteront une option où le joueur pourra paramétrer la difficulté du jeu. Si c'est trop difficile, baissez la difficulté. Si c'est trop facile, ajoutez en.

Quelque soit le but que vous définissez, vous devez vous assurer que les objectifs peuvent être atteint. Si vous choisissez que la lutte des uns contre les autres est le principal enjeu, ce sera en effet une façon de définir l'objectif. 

Mais ce n'est pas suffisant. Même quand le joueur a un adversaire, ajouter d'autres obstacles peut augmenter la richesse et l'attrait émotionnel du jeu.

Le combat (suite)

L'objectif du jeu coopératif, est de mettre fin au conflit. Mais il il se peut que pour la survie, on doive lutter pour justement survivre et se développer. Il n'y a pas de limites aux combats. Et un jeu sans combats est un jeu mort.
Source : http://www.allthatsepic.com/
Cela peut sembler déroutant au premier abord, mais avoir des difficultés pour obtenir quelque chose est plaisant. Si ce n'est pas toujours le cas dans la vie quotidienne, c'est en revanche vrai dans les jeux. 

Nous attendons des jeux des défis. S'ils sont trop simples, nous n'aurons pas de plaisir à jouer. 

Nous attendons la satisfaction du travail accompli dans le jeu. Si nous n'avons pas le sentiment d'accomplissement, de maîtrise, de victoire, bref, si tout est trop facile à obtenir, le jeu ne sera pas intéressant. 

Cela ne signifie pas que nous voulons que la difficulté soit insurmontable. Car nous pourrions alors sentir de la frustration. Il faut donc trouver un équilibre dans le jeu. Soit dit en passant, le terme « équilibre » ne signifie pas toujours la même chose, que l'on soit dans un jeu solitaire ou multijoueurs.

Dans le cas d'un jeu multijoueurs, les joueurs ont besoin de se situer, c'est à dire d'avoir accès aux informations sur leurs niveau, et qu'aucun autre joueur n'ai d'avantages différents. Dans un jeu solitaire, l'équilibre signifie que le joueur a un niveau raisonnable à atteindre, et que plus il joue, plus il maîtrise le jeu, et donc plus il a de chance de gagner.

Il y a quelques temps, je me suis rendu dans une boutique à Greenwich Village, pour y acheter quelques denrées : une terrine et du fromage. Après que j'eusse commandé la terrine, le vendeur me demande si je prends des cornichons avec. D'un geste majestueux, il me sort : « On ne prend pas de terrine sans cornichons! ». Et ben il a fait une vente supplémentaire.

Comme dans les jeux, il doit y avoir une « lutte interactive » vers un objectif. Dans le cas du vendeur, il ajoute une condition à l'achat de la terrine.

Structure

Mon ami Eric Zimmerman aime à déclarer que « les jeux sont des structures du désir ». Je n'aime pas trop cette expression pour deux raisons. Tout d'abord, elle est assez obscure, elle a besoin d'être expliquée pour être comprise. Deuxièmement, elle sonne comme si le jeu était une porte close.

En fait, ce qu'Eric veut dire par « désir », c'est que les jeux ont des objectifs, et que les joueurs se comportent comme si l'objectif était important pour eux quand ils jouent. Le jeu créant le désir d'atteindre les objectifs du jeu. 

Par la structure, il veut dire que les interactions des règles du jeu, ses composants, son moteur etc sont à la portée des joueurs.

Les enfants inventent souvent leurs propres jeux du « Gendarme et Voleur ». Ils sont souvent plus enclins à imaginer qu'ils se transforment en un animal ou qu'ils sont un enfant du 19ème siècle, comme par magie, transportés à l'ère moderne. Il n'y a, en fait, pas beaucoup de différences entre l'imagination de l'enfant, et un jeu de rôle commercial.

Dans les deux cas, chaque joueur prend le rôle d'un personnage unique dans un monde imaginaire. La différence principale, dans le cas de l'imagination de l'enfant, est que la dimension de l'imaginaire a une structure minimale. Il n'y a pas de tableaux complexes, d'algorithmes, de règles de magie ou d'avancement du personnage, ni de Maître de Jeu impartial. Et l'intrigue, dans la mesure ou il y en a une, est inventée sous l'impulsion du moment. 

Pourtant, même les enfants imaginatifs ressentent la nécessité d'une structure. Ils créent des règles pour eux-mêmes, au fur et à mesure que les problèmes surgissent. Ainsi, vous pourrez vous transformer en oiseau, uniquement quand vous serez par exemple, dans le parc en train d'escalader un toboggan. 

Si vous voulez attaquer quelqu'un, il va falloir le cibler d'abord. La structure, tout comme l'intrigue, est inventée en fonction des besoins. Mais les enfants ressentent par moment le besoin de structurer. 

Souvent, les structures qu'ils inventent sont conservées pour la prochaine session de jeu. Et quand l'imaginaire tombe en panne, c'est généralement parce que les enfants ne sont pas d'accord entre eux sur la structure établie. (« Pan! T'es mort! », « Nan, je ne suis pas mort!»)
Source : http://www.millenium.org/
Pourtant, la mort est la même pour tous les jeux. Nous devons tous penser que nous jouons les même choses, se basant sur les même règles, et les même structures. L'imagination fait partie de la même structure dans à peu près tous les jeux. Dans les jeux de rôle, la structure peut être codifiée de façon rigide. C'est vrai pour les jeux de plateau par exemple.

Les Wargames sont joués sur un plateau et une grille hexagonale. La grille hexagonale fonctionne comme échiquier. Les unités militaires sont représentées par des cartons placés dans les hexagones du plateau.
Jeu de plateau Moon Base Clavius

Une des structures fondamentales dans les Wargames est la Zone de Contrôle (ou « ZOC »). 
Zone de Contrôle
La Zone de Contrôle d'une unité comprend les six hexagones directement en contact avec l'hexagone sur laquelle l'unité est placée. Certains jeux utilisent ce que l'on appelle une Zone de Contrôle verrouillée. Une Zone de Contrôle est verrouillée si une unité est bloquée dans ses déplacements. 

Par exemple, vous avez une unité dans un hexagone. Lorsque c'est à moi de jouer, je déplace une de mes unités à côté de vous. Je ne peux ni bouger ni avancer mon unité, parce que je viens de pénétrer dans votre Zone de Contrôle. 

Lors du combat, votre unité pourra être tuée et retirée du jeu, ou bien tuera mon unité, ou la forcera à battre en retraite. Alors, nous ne seront plus en Zone de Contrôle et mon unité (en supposant qu'elle ai survécu), pourra continuer à évoluer. Mais aussi longtemps que les unités seront en Zone de Contrôle, elles ne pourront se déplacer.

Bon, ceci est une forme de Zone de Contrôle. Une Zone de Contrôle Rigide fonctionnera un petit peu différemment. Bien que le concept de base demeure inchangé, une unité devra s'arrêter si elle pénètre dans une Zone de Contrôle Rigide (ndt et ne pourra quitter volontairement la zone sans combat). 

Mais si elle commence son déplacement sur un hexagone non affecté par une Zone de Contrôle, passe par un hexagone affecte par une Zone de Contrôle, puis continue son chemins sur un hexagone non affecté par une Zone de Contrôle, alors le déplacement est autorisé. Mais il n'est pas autorisé de passer d'une Zone de Contrôle à un Zone de Contrôle Rigide sans combat.

C'est une petite distinction dans les règles, mais cette petite distinction peut produire des résultats très différents sur le jeu.

Verrouiller une Zone de Contrôle aura tendance à engendrer une Zone de Contrôle Rigide, comme le jeu World War I. Lorsqu'une unité est engagée sur une zone, il est difficile de déverrouiller cette zone. Les Zones de Contrôle Rigides auront tendance à créer des Zones Fluides, comme dans World War II, car dans ce type de jeu, une unité peut être déplacée pour être affectée à une autre attaque, ailleurs. Ce ne sont là que certains types de Zone de Contrôle.
World War 1 : diorama
Lorsque j'étais adolescent, j'ai travaillé pour un éditeur de jeu nommé SPI. A un moment donné, j'ai mis à disposition un ouvrage composé des règles de tous les jeux crées par SPI. Un ouvrage de référence pour tous les game designers, qui pouvaient y trouver les différentes techniques et concepts des jeux de guerre qui avaient précédemment été crées. 

Il n'y avait pas moins d'une bonne douzaine de Zones de Contrôle différentes, et je ne me souviens même pas des différents termes qui étaient utilisés pour les nommer : semi rigide, fluide, et Dieu sait quoi.

Et alors? Alors, une Zone de Contrôle contient des règles de mécanique pour les jeux de guerre. La plupart des jeux, mais pas tous, utilisent le relief du terrain, le résultat des lancés de dés... Toutes une série de concepts spécifiques pour le jeu de guerre sur plateau.

En combinant ces règles de mécanique, vous obtenez une structure. Vous construisez un cadre qui défini le fonctionnement du jeu, et guide le comportement du joueur.

Des modifications négligeables dans la conception de ces règles peuvent entraîner des différences majeurs dans le déroulement du jeu. Comme nous l'avons vu avec les Zones de Contrôle verrouillées et les Zones de Contrôle Rigides.

Dans un jeu de société, la structure est principalement contenue dans les règles du jeu. Bien que des aspects peuvent être contenus sur les cartes du jeu, ou d'autres composants du jeu (jetons...), la structure est directement perçu par le joueur. La compréhension exigera un effort de sa part. Il ou elle devra apprendre et maîtriser les règles.

Les jeux vidéo fonctionnent différemment. Une grande partie de leur structure est invisible par l'utilisateur. Elle est compilée dans le moteur du jeu. Dans un jeu, les joueurs sont responsables de l'exploitation du jeu, autant que de leur jeu. 

Lorsqu'un calcul doit être fait, ou un algorithme appliqué, ils se réfèrent aux règles. Dans un jeu vidéo, les « règles » sont intégrées dans le moteur de jeu. Le joueur va améliorer sa compréhension du jeu par l'expérience, en jouant, et n'est donc pas obligé d'apprendre et maîtriser les règles pour jouer.

Mais la structure est là, et renforce le point que le game design est différent du design graphique. Elle sera indépendante de la forme graphique, dont la structure est montrée au joueur. 

La jouabilité, les algorithmes, les règles, les données numériques qui contrôlent le comportement des éléments du jeu sont indépendants des images bitmap, modèles 3D, et interfaces qui s'affichent à l'écran. Les animations indiqueront au joueur que certains événements ont lieu.

Les structures de jeu vidéo modifient-elles le comportement du joueur de la même façon que les structures des règles du jeu? Sans aucun doute. Par exemple, Ultima Online et EverQuest sont, à bien des égards, des jeux très similaires. 

Les deux sont des MMORPG, avec intégration d'une quête, type MUD (ndt Multi User Dungeon), définis dans des mondes fantastiques. Dans les deux cas, les personnages tentent d'accumuler un maximum de choses qui ont une valeur dans le jeu : armes, armures et manas.
Vous pouvez attaquer et tuer d'autres personnages-joueurs. Dans EverQuest, vous ne pouvez pas.

Dans les deux jeux, les personnages ont presque toujours des props (ndt : armes, protections...) plus précieuses que les monstres qui ont des pouvoirs équivalents. Ainsi, dans Ultima Online, le moyen le plus rapide pour progresser dans le jeu est de tuer les autres personnages-joueurs. Vous obtiendrez toutes les armes, armures et pouvoirs magiques.

En conséquence, Ultima Online est, dans la plupart des circonstances, une guerre totale, du tous contre tous (CF Thomas Hobbes). Le jeu est animé d'une peur palpable, avec des personnages qui fuient, tentant d'éviter des rencontres potentiellement mortelles.

En revanche, dans EverQuest, les joueurs s'arrêtent fréquemment pour s'aider mutuellement, discutant avec des passants, au hasard, et en général, se comportant avec un minimum de solidarité sociale.


Personnellement, je préfère cette seconde version, Bien qu'Ultima ai ses points forts aussi, particulièrement dans le fait que les maîtres de jeu sont plus impliqués dans la créations de choses intéressantes à faire pour les joueurs. 

Et il y a des joueurs qui préfèrent le style d'Ultima qui, à certains égards, crée des communautés virtuelles de manière plus efficace, puisque vous avez plus de chances de survivre si vous rejoignez un groupe de personne.

Toutefois, cet aspect n'est qu'une petite variante dans la structure qui produit un grand changement dans le comportement du joueur.

En critique littéraire, on parle souvent de « structure » d'un roman, mais elle est très différente de la structure du jeu. Le concept littéraire de la structure a à voire avec le point de vue, le traitement du temps (si l'histoire est raconté au présent, au futur, sous forme de flashback, ou d'un point de vue du passé), et la façon dont l'histoire crée un suspens, une tension. 

Cependant, la structure de l'histoire crée un seul récit, immuable, que le lecteur ne peut pas modifier. La structure narrative est une seule dimension, car vous ne pouvez suivre qu'un chemin d'accès à travers l'histoire.

La structure du jeu doit faire avec les moyens par lesquels elle va former les comportements du joueurs. Si en effet, le jeu forme les comportements du joueur, il ne les détermine pas. 

Un bon jeu fournit suffisamment de liberté aux joueurs, pour qu'ils puissent l'expérimenter avec des approches et stratégies différentes. Une structure de jeu est multidimensionnelle, parce qu'elle permet au joueurs de prendre beaucoup de chemins différents dans l'espace de jeu.

Cependant, il est important de comprendre comment et pourquoi les structures de jeux façonnent le comportement du joueur. En effet, cet compréhension est fondamentale pour maîtriser l'art de la conception d'un jeu. 

Vous ne pouvez pas simplement projeter un ensemble de différents éléments de jeu et s'attendre à ce que ces éléments fassent émerger un nouveau jeu. Vous devez énoncer, consciemment quel type d'expérience vous souhaitez transmettre à vos joueurs et créer des systèmes qui permettent cet expérience.

Prenons, à titre d'exemple, un échec artistique. Dans Ultima Online, on encourage le conflit entre joueurs (appelé « player killing, ou « PKing »). Est ce que Garriot a choisi de créer le Pking, pensant que ça allait rendre le jeu plus intéressant, et que cela correspondrait à l'attente des joueurs? A t-il conçut le jeu avec cette intentionnalité, enrichissant le Pking parce qu'il souhaite l'encourager?

Assurément, non. Ses précédents jeux Ultima, joués en solo, mettaient tous leurs attentions, avec des efforts consciencieux, à guider les joueurs vers une plus grande morale, et un grand sens social. Garriott a développé l'idée que les jeux peuvent avoir, dans les textes, un grand sens moral, et sérieux. Il a sans doute été atterré par le comportement des joueurs qui ont choisi le personnage meurtrier de son jeu.

Pourquoi alors, a t-il conçu un jeu qui pousse au meurtre?

Probablement du désir d'accorder aux joueurs la liberté d'agir de façon méprisable, s'ils le désirent.

Les interdictions de tuer dans Everquest sont plus marquées, et justifiées parce que cela ne nuit pas au jeu. Mais il existe des moyens plus sophistiqués pour inciter le joueur à garder une certaine morale. Vous pouvez mettre en place un gouvernement autoritaire, avec des PNJ qui traquent et exécutent les meurtriers. 

Vous pouvez également mettre en place une prime élevée, qui rende la chasse et l'abattage des meurtriers plus gratifiantes que le meurtre. Vous pouvez tenter de recréer, dans le contexte du jeu, le même type de lien de parenté, ou de communauté parmi les joueurs, pour empêcher les meurtres, à l'instar de la police.

Ce que vous ne pouvez pas faire, c'est présumer qu'un ordre surgira spontanément, grâce à la bonne volonté des joueurs, du moins, pas tant qu'il y aura une forte récompense à ramasser après un meurtre, et des récompenses plus faibles à récupérer lorsqu'on se comporte en bon citoyen.

La structure d'un jeu est similaire à la structure de l'économie. Les économistes supposent que les personnes répondent aux opportunités de s'enrichir. Mais cela ne signifie pas que tout le monde va tenter d'amasser le plus d'argent possible. 

C'est une option, mais la soif de pouvoir, de reconnaissance, ou d'amour peuvent souvent l'emporter sur les considérations monétaires. Mais les économistes assument que les gens agissent rationnellement.

Il en va de même dans les jeux. En gros, vous pouvez vous attendre à ce qu'un joueur réponde aux sollicitations du jeu. Mais pas toujours. Parfois, les joueurs prennent un malin plaisir à détourner les règles. 

Mais une des opération fondamentale, comme je l'ai dit précédemment, consiste à agir comme si les objectifs à atteindre dans le jeu étaient importants. Aussi, la plupart du temps, les joueurs s'emploieront à exploiter la structure du jeu pour atteindre leurs objectifs.

En d'autres termes, la structure du jeu s'apparente à une économie, un écosystème complexe, qui ne dicte pas les comportements mais guide le joueur pour atteindre un seul objectif. 

L'énergie dans le cas d'un écosystème, l'argent, dans le cas d'un système économique, et la victoire dans le cas d'un jeu. 

Si j'avais eu une solide formation d'économiste, elle serait aussi nécessaire pour tous ceux qui chercheraient à en savoir plus sur la conception de jeu. Un jeu est une structure interactive, qui exige que les joueurs se battent pour atteindre leur objectif.

Sens Endogène

Vous avez probablement remarqué que jusqu'à présent, j'ai utilisé un langage assez basique, comme un gamin qui ferait une analyse critique du jeu vidéo. Je veux dire, qu'au lieu d'utiliser des mots simples comme « objectif » ou « lutte », j'aurai pu aussi inventer des termes prétentieux, à rallonge, pour impressionner la galerie. 

Et le terme « endogène » vient s'immiscer ici, comme si le jeu vidéo pouvait s'analyser comme une véritable oeuvre d'art. Mais je n'ai pas trouvé de terme plus simple que celui d'« endogène ». Que signifie ce terme?

Selon le dictionnaire, le terme « endogène » signifie « qui se forme à l'intérieur de », « sans intervention de l'extérieur ». C'est tellement juste dans le cadre de la structure d'un jeu. 

Le jeu crée son propre sens. Sa signification évolue à l'intérieur de sa structure, et est causé par sa structure. Son sens est endogène à sa structure.

Supposons que vous marchiez dans la rue. Quelqu'un vous donne 100 dollars en billet de Monopoly. Ces 100 dollars ne vaudront rien pour vous, car l'argent du Monopoly n'a aucune valeur dans la vie réelle. Le type qui vous a donné le billet est probablement un aliéné.

Pourtant, lorsque vous jouer au Monopoly, cet argent a de la valeur. On y joue jusqu'à ce que tous les joueurs soient en faillite, sauf un, qui est le vainqueur. 

Au Monopoly, le volume d'argent que l'on possède est déterminant pour le succès, ou l'échec. L'argent y a une valeur endogène, ce qui signifie que son importance est vitale pour les joueurs, au point que vous devez surveiller votre petite sœur comme une buse, pour vous assurer qu'elle ne vole pas de billets à la banque quand vous avez le dos tourné.

Un autre exemple, mon personnage dans Everquest au niveau 7, s'est vu offrir un Bloodforge Hammer par un autre personnage qui avant de quitter le jeu a décidé de me donner son arme. Il est possible de gagner ce type d'arme par vous même au niveau 7, en remplissant une quête,  et j'aurai eu peu de chance d'y arriver. 
Bloodforge Hammer. Everquest.
Aussi le Bloodforge Hammer fût une arme géniale pour mon personnage et lui a permis de progresser rapidement. Le Bloodforge Hammer existe uniquement en 3D dans l'interface d'Everquestet sa valeur est uniquement numérique et logique pour ce jeu. Il n'a aucune valeur en dehors de ce jeu. 

Ce n'est pas totalement exact. Je pourrai aller sur Ebay, et mettre aux enchères mon Bloodforge Hammer d'Everquest. Je n'ai aucune idée de comment faire, mais je suis sûre que c'est possible. Des gens mettent fréquemment aux enchères des personnages, des props ou des crédits de jeu d'Ultima Online et Everquest

On peut donc admettre que le Bloodforge Hammer a une valeur dans le monde « réel », dans la mesure ou je peux transformer sa valeur en monnaie réelle. Néanmoins, sa valeur réelle existe uniquement dans le contexte d'Everquest

Si Verantwort, éditeur et exploitant d'Everquest stoppe demain les serveurs, ma possession fictive d'un Bloodforge Hammer cessera immédiatement d'avoir du sens. Et plus personne ne sera prêt à payer pour l'avoir.

Avons nous à présent une définition hermétique et complète du jeu? Une structure interactive endogène, qui nécessite que les joueurs lutte pour atteindre un but? Il est parfois utile de tester une définition pour s'assurer qu'elle contient bien touts les éléments que nous voulons y inclure, et exclure. 

Donc : Est ce que la Bourse est un jeu?

La Bourse est interactive, si vous vendez des actions, vous influencer sur leurs cours. La plupart du temps, vous l'influencer de façon marginale. Mais si l'action est intelligemment vendue, ou si vous êtes un investisseur averti, vous allez sensiblement modifier sa valeur. 

Le marché boursier a assurément une structure, inscrit dans sa législation en fait. Acheter et vendre des actions sur le marché boursier est un veritable un combat, et il est difficile de faire partie de S&P 500*, comme n'importe quel trader peut en témoigner. La Bourse a certainement un but : les « acteurs » cherchent à gagner de l'argent. 

Mais ce sens de la Bourse n'est pas endogène. Les actions que nous échangeons sur le marché auront toujours de la valeur si la Bourse venait à s'évaporer demain. En vrai, si le New York Stock Exchange disparaît demain, il sera difficile pour moi de vendre mes actions de General Motors. 

Si la Bourse offre une grande flexibilité et facilité d'accès aux actions, elle n'est pas le seul marché des actions. Les gens achètent également des actions de sociétés privées qui ne sont pas cotées en Bourse. Les entreprises font ça tous les jours, achetant des parts dans une société, fournissant ainsi une part de son capital.

S'il est difficile de trouver des vendeurs ou des acheteurs de parts pour des entreprises qui ne sont pas cotées en Bourse, c'est parce qu'il est difficile de déterminer la juste valeur marchande de ces sociétés. 

Mais ces actions ont une valeur dans le monde réel : elles représentent le contrôle d'une partie de l'entreprise, et donc un investissement qui peut rapporter de l'argent dans le futur. La Bourse est un mécanisme pour faciliter les échanges, mais ce n'est pas une créatrice de structure pour échanger des actions sur le marché.

La différence entre la Bourse et le jeu, c'est la différence entre la réalité et la fiction. Il existe une différence fondamentale entre les deux. Même si en littérature, « réalité » et « fiction » sont associé à un style, la réalité tend à être dans le monde réel, quand la fiction tend à être dans le fantastique.

Les jeux sont dans le fantastique. Je ne veux pas dire que tous les jeux tournent autour du monde des orques, des elfes et de la magie, même si bon nombre d'entre eux le sont, mais ils ne sont pas réels. Le fait qu'ils ne soient pas réels est un de leurs points communs. Comme pour la fiction, les jeux fournissent leurs propres contextes. Dans un roman, l'écrivain brosse un tableau du monde, dépeint des personnages, fournit un contexte pour le lecteur. 

Même si beaucoup de ce que le roman contient est tiré du monde réel, le lecteur est supposé comprendre que ce n'est pas une représentation exacte d’événements réels. Il est censé prendre du plaisir, en s'immergent dans l'environnement, les événements des personnages décrits, et en appréciant le talent de l'artiste qui les a décrit.

Parfois, la fiction re contextualise les choses de façon inattendue : comme le souligne Samuel R. Delaney, l'expression « Le monde a explosé » a un sens très différent dans les romans de science-fiction et dans les romans réalistes de fiction (et encore un autre sens dans un roman porno).

Les jeux font la même choses. Le Bloodforge Hammer n'a aucun sens, sauf dans le contexte d'Everquest. Le mot « pion » a certainement un sens externe au jeu d'échecs, mais il a un sens précis dans le contexte d'un jeu qui est thématiquement relié, mais indépendant. 

Un carré d'As (Royal Flush) est un ensemble vide de sens, sauf dans le contexte du Poker. Tuer dans Quake ne fera rien dans le monde réel, mais il peut apporter jubilation ou satisfaction quand vous êtes dans le jeu.

Je dois préciser que la ressemblance entre les jeux et la fiction ne devrait pas être exagérée. En ce sens que de nombreux jeux sont des tentatives ou des simulations d’événements du monde réel avec un haut niveau de précision.

Il y a quinze ans, j'ai travaillé sur un jeu appelé Imperium Romanum II (Albert A.Nofi), qui était une tentative sérieuse et savante pour simuler le conflit civil romain entre Marius et Sylla. Les recherches pour la conception et le souci du détail étaient incroyables. 

Je maintiens que vous pouvez en savoir plus sur l'armée romaine, ses bouleversements, la nature des conflits internes de l'Empire, en étudiant le jeu d'Albert A. Nofi, qu'en lisant six ouvrages sur le sujet.

Dans certains cas, les jeux sont plus complets que les livres, car ils permettent d'explorer des systèmes, des chemins alternatifs, quand les bouquins vous offrent un narration linéaire.

Imperium Romanum II n'est pas un jeu de fiction, mais le jeu est de la fiction. Le concept de la légion a une réalité externe historique, mais dans le contexte du jeu, c'est un élément majeur avec certaines capacités et valeurs numériques. 

Le concept de la voie romaine est tiré du monde réel, mais dans le jeu, il réduit sa surface à des hexagones que l'ont développe dans certaines provinces, en fonction du résultat du lancé de dés. 

Le concept d'une province est réel, mais dans le jeu, une province est une collection d'hexagones qui conjointement, permettent aux joueurs qui les possèdent de collecter des impôts. Imperium Romanum est tiré de la réalité, mais re contextualise cette réalité. En recréant sa propre réalité, il devient endogène.

Divertissement Interactif (Interactive Entertainment)

Enfin,nous avons une définition fonctionnelle du « jeu » : une structure interactive et un sens endogène, qui exige que les joueurs se battent pour atteindre un objectif. 

Une question se pose immédiatement : si le « jeu » est un sous-ensemble du « divertissement interactif », quelles formes de divertissement interactif sont exclues de notre définition?

Ma réponse : aucunes. Y compris celles qui sont juste bonnes à mettre à la poubelle. De toute façon, beaucoup de gens seraient en désaccord. Il y a un certain nombre de sites de divertissement interactif sur internet qui sont dépourvus de jeux. 

Et si vous les explorez, vous trouverez qu'ils ne rentrent pas dans cette catégorie. Au mieux, ils utilisent les technologies d'internet pour fournir une expérience non-interactive. Un site qui publie des articles, des vidéoclip, ou de la musique à télécharger est en effet un site de divertissement. 

Mais il ne va pas vous permettre d'interagir avec le divertissement, dans le sens du jeu. Vous pouvez aussi obtenir le même divertissement depuis un support différent (presse, CD...).
http://evemuseografia.com/
« Une structure interactive de sens endogène, qui nécessite que les joueurs luttent pour atteindre un but ». Quel genre de divertissement interactif peut être différent de ça? Il pourrait être non structuré. Mais en même temps, difficile d'en imaginer un informel, sans structure, à moins qu'il ne soit une simple conversation. 

Et sans doute que certaines personnes trouvent divertissant de discuter en ligne. Mais parce qu'il trouve divertissant de discuter ne signifie pas qu'il s'agit d'un divertissement.

J'ai lu pas mal de bouquins d'Histoire, parce que je trouvais amusant de le faire. Et pourtant, personne ne considère un ouvrage d'Histoire comme un divertissement, mais plutôt divertissant.

Le divertissement est un effet secondaire, pas l'objectif. De même qu'une conversation peut être amusante, elle n'est pas pour autant un divertissement en soi.

Pour être une forme de divertissement, vous avez besoin d'une sorte de structure. Et vous avez besoin de sens endogène. La forme doit donner du sens dans le contexte de l'oeuvre. Les films, la musique, et les romans l'ont tous. 

Seulement, si la forme est connectée avec le monde réel, elle n'est pas endogène. Comme c'est le cas avec l'Histoire, ou la Bourse. Si la forme est en relation direct avec le monde réel, vous avez une forme pratique, pas une forme de divertissement.

Peut être que ces éléments, qui ne sont pas des jeux, mais qui ont une dimension ludique interactive, sont aussi incompatibles avec la notion d'affrontement? C'est possible. Une oeuvre comme Just Grandma and Me, un livre interactif pour enfant, n'implique pas de combat particulier. Vous cliquez sur une icône, avez une chouette petite animation, lisez le texte, et allez à la prochaine page. 

Les enfants de 4 ans trouvent ça amusant. Et la plupart des CDROM « Voyages et Découvertes » pour adulte fonctionnent sur le même principe. Cliquez sur une icône, visionnez un paysage sympa, passez à l'icône suivante. Cela me semble extrêmement fastidieux, et c'est sans doute pour cela que le terme CDROM interactif n'existe plus. Sauf pour les jeux.

Peut être aussi que nous pouvons avoir un « divertissement interactif » sans objectif?
Encore une fois, vous pouvez. Vous pouvez avoir un produit de divertissement inutile, une chose interactive qui n'a aucun but, aucune raison d'interagir, aucun objectif, aucun sens. C'est, euh, inutile.

Theodore Sturgeon, un écrivain de science-fiction a grandi dans une famille littéraire. Il raconta l'histoire de ses parents, habitués à lire toutes sortes de bouquins de science-fiction à leurs enfants, y compris des ouvrages de Moby Dick, plutôt destinés à un public adulte. 

Lorsqu'il était enfant, Theodore s'acheta un exemplaire du magazine Astouding Stories avec son argent de poche. C'était le plus beau magazine de science-fiction de l'époque. De retour à la maison, son père lui a arraché la moitié du magazine et l'a jeté à la poubelle. « C'est ce que nous faisons avec les déchets dans cette maison », dit-il.
Samuel Delaney nomme cette littérature qui engendre cette répugnance extrême, la paralittérature. « C'est une réaction extrême aux textes » dit-il. Et ce fût ici le cas.

Beaucoup de ce qui était contenu dans Astounding Stories étaient du blah blah, mais paradoxalement, c'était sans doute ce qu'il y avait de mieux comme publication de science-fiction dans les années 40 et 50. Une bonne partie est encore publiée aujourd'hui. 

On pourrait débattre des heures, sur les mérites de la science-fiction, comme pour tout, mais assurément, la littérature de science-fiction mérite qu'on s'intéresse à elle.

La recherche du « divertissement interactif » qui n'est pas un jeu, est motivé par la répugnance pour les jeux, ceux à bas prix, de mauvais goût, violents, désagréables, dégradants, populaire, pour les illettrés. 

C'est une recherche pour ceux qui veulent réaliser un produit de qualité supérieure, « au dessus de la mêlée » et des jeux vidéo bas de gamme.

En bref, la recherche de divertissement interactif en dehors du jeu est butée, inspirée par une mauvaise approche des jeux débiles, et une réponse réflexive à ce que les jeux représentent aujourd'hui dans notre culture.

Toute forme de divertissement interactif qui n'est pas un jeu doit être sans interaction, sans divertissement, ou inutile.

L'art peut être mis en valeur par le divertissement interactif. Il l'a été, l'est, et inévitablement produira encore de grandes œuvres de la créativité imaginative. Mais si vous êtes à la recherche de jeux, vous recherchez au mauvais endroit. Le divertissement interactif, c'est Le Jeu.

La taxonomie de Leblanc

Nous avons donc une définition fonctionnelle des jeux, qui nous donne une idée de ce que nous devons faire pour créer des jeux: fournir des objectifs, créer un sens endogène, établir une structure, et s'assurer que le joueur va lutter. Mais nous avons toujours besoin de regarder à quoi sert les jeux, et ce qui les rend attractifs. 

A ces fins, je pense qu'il est utile d'emprunter au game designer Marc Leblanc, sa taxonomie. Il a proposé une liste de huit plaisirs qu'il considère comme étant les « plaisirs ludiques » fondamentaux.

Sensation

De bons visuels offrent une forme de plaisir sensoriel. Nous aimons les beaux jeux. L'habillage sonore est aussi essentiel. Pour certain jeu, le plaisir tactile est aussi important. Parfois, le contrôle du jeu est aussi une sensation agréable. Pour certains jeux, les sensations musculaires sont aussi importantes. C'est le cas des jeux sportifs. C'est aussi le cas des jeux d'arcade japonais, comme DDR (Dance Dance Revolution).

Pour illustrer une sensation simple, considérons le jeu de société Axes & Allies. J'ai d'abord acheté ce jeu quand il a été publié par Nova Games, un obscur éditeur de jeux. Il avait un look très criard et les cartes pour représenter les unités militaires étaient moches. 

J'y ai joué une fois, ne l'ai pas trouvé passionnant, et l'ai rangé. Quelques années plus tard, il a été racheté et publié par MB (Milton Bradley), avec un nouveau plateau plus harmonieux, des centaines de figurines en forme de d'avions, navires, chars et soldats. J'y ai rejoué plusieurs fois depuis. C'est un pur bonheur tactile que de déplacer les figurines sur le plateau. Ça rend le jeu amusan
Cependant, il est important de noter que la conception graphique ou généralement que le design du support n'est pas en soi, le design du jeu. C'est un raisonnement sophiste, qui est souvent fait par ceux qui ne comprennent pas comment les jeux sont fait. Parce que ce qu'ils voient quand quelqu'un joue à un jeu vidéo, c'est une animation sur un écran. 

Et il est naturel de penser que la conception de jeu est comme la scénarisation ou comme la production de film. A maintes reprises, Hollywood à essayé d'évoluer dans notre domaine du jeu, en affirmant « comprendre le divertissement » - ce qui est vrai, du moins, le divertissement linéaire et visuel est compris-. Les gens d'Hollywood ont tendance à produire de magnifiques jeux mais ennuyeux.

Créer des plaisirs sensoriels est important, et quand vous concevez un jeu, vous devez prendre en compte cet aspect. Mais si c'est un facteur important, ce n'est pas l'essence de la conception.

Les beaux jeux peuvent être dénués de plaisirs sensoriels. A mon avis, NetHack est un des meilleurs jeux jamais développé. J'y joue encore et y ai joué sur tous les ordinateurs que j'ai eu ces 15 dernières années. Et c'est un graphisme ASCII de base.

Fantaisie (Fantasy)

La seconde catégorie que Marc Leblanc a défini est la fantaisie. Il ne faut pas comprendre littéralement ce qui est caractérisé par la présence d'orques, d'elfes ou de magie, mais quelque chose de similaire, dans le concept de la fiction, comme une trêve de l'esprit cartésien.
Fantasy Girl
Tout comme il est agréable de vous plonger dans un roman, même si l'action se passe de nos jours, avec des personnages que vous pourriez rencontrez au café du coin, ou dans un monde futuriste imaginaire, c'est toujours un plaisir de se laisser emporter dans l'univers d'un jeu.

Des jeux plus abstraits comme les Échecs, ne fonctionnent pas exactement sur ce mode. Parce qu'il y a peu de points de connexion en dehors de son système endogène. 

Les Échecs offrent peu de fantaisie. Ce n'est pas un défaut. Je ne pense pas que ce jeu tirerait des bénéfices à avoir une scène cinématique qui expliquerait qu'il s'agit d'une guerre entre deux frères.

Mais lorsque vous conceptualisez des jeux, il est important de penser aux moyens que vous allez mettre en oeuvre pour permettre aux joueurs de s'immerger dans votre univers. 

Des méthodes simples, comme l'écriture, dans un langage approprié, ou l'utilisation de représentations graphiques qui définissent l'esthétique, ou encore l'utilisation de systèmes qui simulent certains réglages du jeu. Tous ces éléments peuvent renforcer la dimension fantaisiste d'un jeu.

Le récit (Narrative)

La question de savoir si les jeux sont, devraient, ou ne devraient pas être un moteur narratif, est litigieuse. Il y a ceux qui maintiennent que tous les jeux nécessitent une histoire, ceux qui défendent l'idée que le jeu et l'histoire sont en opposition direct, et enfin ceux qui pensent que l'histoire est un élément utile dans certains jeux mais pas tous.

Personnellement, j'aurais tendance à aller vers cette dernière idée.

Si les Échecs ne gagneraient rien à avoir une scène cinématique pour justifier l'origine d'un hypothétique conflit entre deux frères, un jeu d'aventure/action sans histoire manquerait de relief.

Mais par récit, Marc Leblanc ne veut pas littéralement parler d'histoire. Ce qu'il entend est d'avantage que les jeux devraient contenir de l'émotion.

En cours de littérature, votre professeur vous a sans doute expliqué comment est construit une pièce de théâtre : mise en place/confrontation/résolution. C'est aussi une structure efficace pour parler de jeux. Faire monter la tension, s'accompagne parfois d'un sentiment d'accomplissement. Parfois, une succession de petits pics de tension vous permettront de reprendre votre souffle.

C'est bien plus facile à réaliser avec un jeu scénarisé, comme les jeux d'aventure/action, qu'avec un jeu axé sur des algorithmes comme Civilization. Mais même dans ces types de jeux, il est utile de réfléchir à comment vous allez intégrer une dimension dramatique et une tension au fil du temps.

Le Défi (Challenge)

La quatrième catégorie définie par Marc Leblanc est le défi, qui est l'équivalent de notre notion de la lutte (combat).
Comme je l'ai soutenu, c'est au coeur de n'importe quel jeu. Vous pouvez vous passer de fantaisie, d'histoire, mais pas de défis.

Et lors de la conception, vous allez devoir identifier ce que les joueurs vont trouver comme défis dans votre jeu, et pourquoi ces défis seront percutants. Et comme je l'ai dit, vous devrez régler ces défis - probablement pendant les tests, plutôt qu'au moment de leur élaboration. Et ce afin d'éviter que le jeu ne soit trop facile ou trop compliqué.

Soit dit en passant, c'est un aspect plus facile à développer pour les jeux en ligne ou en réseau, que pour les jeux classiques. Avec les produits « en boîte », vous êtes limité à ce qui est fourni avec le jeu. Vous pouvez toujours fournir un patch plus tard, du moins pour les jeux sur PC, pour améliorer votre jeu. Mais la plupart des joueurs ne l'installeront pas.

En revanche, avec les jeux en ligne ou en réseau, vous pouvez voire comment les joueurs réagissent et apporter des modifications si nécessaire.

Camaraderie (Fellowship)

La notion de Marc Leblanc sur la camaraderie est proche de ce que les joueurs en ligne appellent la communauté. La communauté est le noyau central de ce type de jeux.
Comme l'affirme Gordon Walton, le chef de projet du jeu Sims en ligne : « Ils viennent pour le jeu, ils restent pour la communauté ». A titre d'exemple, considérons le jeu Air Warrior

Lancé à l'origine en 1984, sur le vieux réseau Genie ( ndt : General Electric Network for Information Exchange), et toujours en activité sur ea.com. Il y a des joueurs qui y sont inscrit depuis deux décennies, et il y a encore de nouveaux joueurs qui s'inscrivent, mais se nomment eux-même « Capitaine Untel à la retraite ».

Ce qui signifie qu'ils ne sont plus eux même impliqués dans le jeu, mais qu'ils viennent juste là pour flâner dans les chatrooms et rendent visite à leurs camarades.

Plus généralement, les expériences fortes partagées reproduisent un sentiment de camaraderie.

Pensez aux discussions que vous avez avec vos amis. Peut-être parlez vous de sport, de shopping, de livres que vous avez tous les deux lus ou d'émissions que vous avez vues ou écoutées. 

Mais pour les joueurs, c'est souvent de jeux qu'ils ont joués. Même off line, où l'expérience n'est pas directement partagée. Les expériences communes fournissent des points de contact avec d'autres personnes, et donc des raisons de se sentir proches d'eux.

Découverte

La découverte est un autre intérêt majeur pour de nombreux jeux. C'est particulièrement vrai dans certain cas, c'est même essentiel : l'exploration du monde d'un jeu. Il y a là quelque chose de très convaincant émotionnellement, au début de Civilization
A l'écran, vous avez un petit carré de lumière, entouré d'un vaste mode sombre, qui vous incite à l'exploration. Il y a quelque chose d'excitant lorsque vous pénétrez dans un nouveau Donjon dans Everquest, hésitant, empruntant les couloirs et caves, en alerte à tout moment pour répondre à un imprévu potentiellement mortel.

Mais la découverte peut aussi consister à trouver des informations cachées. C'est le cas dans le Poker par exemple, essayer de deviner le jeu des adversaires, se mordre les doigts quand la distribution de cartes vous permet ou non de compléter votre flush.

Cela peut être le résultat d'une grande variété de combinaisons dans l'espace de jeu. Le Jeu Magic : L'Assemblée est un bon exemple. Il y a tellement de cartes différentes que si vous jouez beaucoup, vous rencontrerez toujours de nouvelles combinaisons possibles. Vous aurez toujours des cartes communes et rares qui associées, vous donnerons des résultats astucieux.

Expression

Marc Leblanc signifie par là « l'expression de soi ». Certains jeux offrent aux joueurs les moyens de s'exprimer, afin de choisir la façon dont ils vont se présenter dans le contexte du jeu.

C'est assurément vrai pour les RPG, les MUD's et les MMORPG. Dans la façon dont nous parlons aux autres, le choix de notre surnom, notre costume, ce que nous disons aux autres de nous-même. Et dans de nombreux cas, les interactions avec les autres deviennent la principale raison pour laquelle on joue.

C'est également vrai dans des jeux plus classiques. Ainsi, nous jouons à Hearts ou au Poker pas seulement pour l'expérience du jeu lui-même, mais pour s'engager dans une activité sociale avec les autres. S'entretenir avec les autres est aussi important que le jeu lui-même.

Mais cela est également vrai dans de nombreux jeu en solo. Dans Deus Ex, si vous pouvez gagner en étant un crétin violent, tirer sur tout ce qui bouge, vous pouvez également accéder à la victoire en prenant des chemins détournés, en persuadant les PNJ de vous aider à éviter un canon. 

Dans Black & White, vous pouvez choisir le chemin du mal, ou de la vertu. Dans Civilization, vous pouvez conquérir le monde, gagner grâce à vos supériorités technologiques, ou vous faire des amis et être élu à la tête des Nations Unies.

Parfois, des petites astuces vous permettent d'aller très loin. Le choix du nom du personnage, peut aussi donner au joueur un moyen d'expression de soi modeste.

Un autre exemple avec le jeu Dark Age of Camelot. Le joueur peut acheter de la teinture, pour changer la couleur de ses vêtements ou de son armure. Cet action n'a aucun effet sur le jeu, elle coûte de l'argent au joueur, mais lui donne le sentiment de maîtriser son image. 

Et bien les joueurs le font! Ils dépensent volontairement de l'argent pour modifier l'apparence de leurs avatars, au détriment d'autres choses, comme d'investir dans une arme ou une armure.

Masochisme

C'est probablement un mot étrange pour qualifié la huitième catégorie élaborée par Marc Leblanc. Mais il n'est pas totalement inapproprié. Je l'ai précédemment souligné : nous ne voulons pas que notre vie soit un combat constant, mais nous attendons de nos jeux qu'ils le soient. 
Ce que Marc Leblanc veut dire c'est qu'il existe une part de plaisir à se soumettre à la structure d'un jeu.

Se soumettre est l'opération de base que nous faisons lorsque nous débutons un jeu. On se fiche de savoir si on aura de l'argent ou pas au Monopoly, mais lorsque nous jouons, nous sommes d'accord pour nous soumettre aux règles du jeu. 

On se moque se savoir si on va progresser d'un niveau ce soir à Everquest, mais on fera tout notre possible pour que cela arrive. On se fiche de savoir si les Yankees vont battre les Giants... Bien, ok. Peut-être que si.

En fait, c'est extrêmement frustrant de jouer avec quelqu'un qui ne se soumet pas au jeu. Ce n'est pas drôle de jouer à Quake avec quelqu'un à côté, qui tourne autour et fait des commentaires hors sujet sur le chat. 

Ce n'est pas plus drôle de contraindre votre petite sœur à jouer aux Stratèges, si cette dernière déplace ses pièces au hasard. Et c'est sacrément frustrant de jouer avec quelqu'un qui triche. 

Comprendre la structure du jeu, détermine comment atteindre son objectif, en manipulant ou battant votre adversaire. C'est le propos de la jouabilité.


Artistes

Les artistes – et le game designer, qui est un artiste travaillant dans le milieu des jeux - commencent par l'imitation. Si vous voulez être un dessinateur de bandes dessinées, vous commencerez par essayer de dessiner Spiderman, Superman, ou comme les frères Hernandez. 

Si vous voulez être un musicien de rock, vous commencerez par copier le style de guitare que vous admirez. Si vous voulez être écrivain, vous commencerez par écrire des nouvelles de science-fiction, ou imiterez le style des écrivains que vous adorez. Et si vous êtes un concepteur de jeux, vous commencerez par essayer de concevoir un jeu que vous aimez.

Par la suite, en évoluant techniquement, vous choisirez les techniques que vous maîtrisez le mieux, et tenterez de créer une nouvelle combinaison. Emprunter tel aspect d'un RPG, telle stratégie dans un jeu en 3D temps réel, de réfléchir à comment vous pouvez améliorer la fantaisie, ou encore comment extraire d'un roman existant des éléments pour structurer un jeu.

Et au final, les artistes travaillent avec une intentionnalité. Ils comprennent leurs outils, ne cherchent pas à imiter les travaux déjà existants, mais à les améliorer, jusqu'à atteindre l'objectif souhaité. 
Jimmy Hendrix
Dans ce domaine, et dans tout domaine, il existe seulement une poignée de Maîtres qui ont atteint ce stade : ceux qui travaillent avec une intentionnalité, et créent des produits finis et innovateurs.

Qu'est ce qui fait le jeu?

Lors de la conception d'un jeu, ou lorsqu'on joue en tentant d'analyser son fil rouge (vous devriez vous en sortir avec les éléments que je vous ai donner dans cet essai et l'analyse de Leblanc), demandez vous comment le joueur interagit avec le jeu.

Ces interactions sont-elles significatives? 
Le processus d'interaction est-il
agréable ou fastidieux et, dans l'affirmative, comment
pourrait-il être amélioré ? 

Quels sont les types d'objectifs supportés par le jeu? 

Y a t-il une ou plusieurs solutions pour gagner? Un ou plusieurs gagnants possible

Le jeu offre t-il la possibilité de sélectionner un objectif à atteindre

Si oui, quel style de jeu voulez-vous élaborer, et quels sont les objectifs que vous voulez définir?

Est ce que le moteur du jeu est capable de supporter ce que le game designer essaie de faire avec le jeu? 
Est ce que les algorithmes du moteur se comportent correctement avec votre game design

Le jeu est il suffisamment complexe et intéressant pour maintenir le joueur en haleine?

A quels moments les défis se présentent-ils? Quels obstacles le joueur devra t-il surmonter?

Comment pouvez vous enrichir le jeu ou remplacer certains obstacles?
Est ce trop dur ou trop facile pour le joueur?

Quelles réflexions le jeu crée t-il? 

Est ce que le joueur doit se soucier du fonctionnement du jeu?

Quels sont les éléments de connections entre le jeu et le monde réel?

Quels sont les idées qui traversent l'esprit du joueur quand
il joue?

Quel plaisir cela lui procure t-il?
Et quel plaisir procure le jeu?

Les visuels cadrent-ils avec le thème et l'approche du jeu?
Peut-on rendre le jeu encore plus beau?

Est ce que le choix des acteurs pour les voix est bon?
Devez vous embaucher un professionnel
pour la rédaction des dialogues?

Est ce que la musique est chouette ou fait elle broncher le joueur après 15 minutes de jeu?

Est ce que les contrôleurs réagissent bien ou les joueurs arrivent-ils à mémoriser facilement les commandes pour les actions?

Ou bien cela vous donne t-il le syndrome du canal carpien?

Est ce que le bruit de fond du jeu correspond bien à l'ambiance que vous voulez créer, et apporte son lot d'émotion, comme la première fois ou vous avez lu Tolkien, ou bien cela ressemble t-il plus à une musique stéréotypée pour orques et elfes?


Les joueurs sont-ils immergés dans l'environnement de votre jeu, et cette immersion est elle suffisante pour qu'ils puissent s'intéresser aux personnages?

Ou pas du tout?

Les joueurs peuvent ils être le propre artisan d'une république bananière et commencer à parler avec un accent espagnol ou bien sentent ils juste qu'ils manipulent une force abstraite qui n'est pas vraiment connectée au jeu?
Qu'est ce que le fantastique apporte au jeu?

Et est ce que le système de jeu apporte cette dimension aux joueurs?

Si il y a un scénario dans le jeu, est-il satisfaisant sur le plan émotionnel?
Restons nous captivé par le jeu?
Ou est ce que la fin du jeu est décevante, avec votre adversaire qui prend la fuite après s'être pris quelques coups?

Quand est ce que le coeur des joueurs palpitent 
et pourquoi?


Si la réponse est « jamais », qu'est ce que vous allez apporter pour les faire bondir de leurs sièges?

Est ce que le jeu est un défi, trop facile, ou trop difficile pour la plupart des joueurs?

Est ce que le jeu crée des connections entre les joueurs, ou bien ne ressentent-ils jamais le besoin de communiquer avec les autres joueurs ou parler du jeu?
Comment pouvez vous créer et maintenir un sentiment de communauté ou d'expérience partagée dans le jeu?

Y a t-il des structures que vous pouvez bâtir autour du jeu pour développer plus de participation? - cf notion de Richard Garfield sur le métagame-

Quels codes sociaux utilisent votre jeu?
Comment les joueurs trouvent-ils votre jeu?


Quelles sont les nouvelles choses qu'ils rencontrent au fil du jeu?

Y a t-il suffisamment de variable et de nouveauté?
Le jeu progresse t-il, ou 
est ce encore et toujours le même vieux truc après
plusieurs heures de jeu?

Comment pouvez vous rendre l'exploration du jeu plus intéressante?

Comment pouvez vous encourager vos joueurs à progresser, sans devenir profane ou antisocial?

Est ce amusant d'accepter les restrictions des règles du jeu ou bien vos testeurs détestent-ils certaines contraintes?

Qu'est ce qui semble arbitraire dans votre jeu et comment pouvez vous intégrer cet aspect pour qu'il soit cohérent au jeu?

Lorsque vous vous surprenez à dire:
« Damn! J'aurais aimé pouvoir faire ÇA! »
y a t-il une possibilité pour le joueur de faire ÇA précisément?

Citation finale

J'aimerai vous quitter avec cette citation finale de Jung.

« Une des tâches la plus difficile que les gens peuvent réaliser, même si elle semble méprisable pour certain, est l'invention de bons jeux ».

Vu de l'extérieur, la conception de jeu semble facile. De l'extérieur, l'écriture semble facile, et tout le monde à Hollywood pense pouvoir devenir scénariste. Mais en réalité, c'est l'une des disciplines créatives les plus difficiles. Précisément parce que nous créons des structures que les gens vont pouvoir utiliser de façon très différentes, inclus de façon que nous ne pouvons pas anticiper.

Les jeux sont une forme d'art différente des autres, parce que le résultat n'est pas reçu de façon passive.

Ce n'est pas un texte verrouillé à la virgule près. Au contraire, un jeu tel qu'il est joué, est une collaboration entre les développeurs et les joueurs, une exploration mutuelle, une forme d'art démocratique dans lequel la forme du jeu est crée par l'artiste, mais l'expérience du jeu est crée par le joueur.

Par conséquent, le Game Design est une tentative de création d'imaginer. Et ce sont les expériences que les joueurs auront avec le jeu, qui créeront une structure vous permettant de leurs faire vivre les expériences que vous souhaitez partager avec eux.

En fait, le Game Design n'est pas seulement difficile. Il est impossible. C'est ça, il est
impossible, ou du moins virtuellement impossible, de spécifier un jeu au début d'un projet, et que ça fonctionne au quart de tour, merveilleusement bien, avant qu'un prototype jouable soit disponible. Il y a trop d'éléments en cours de développement, et trop de façon différentes de les réaliser.

Le Game Design est finalement, un processus itératif de débroussaillage, d'ajustement continu durant les tests, jusqu'à épuisement du budget, du planning, et du bon vouloir des managers. On a alors un produit léché, qui en effet, est beau, magnifique, et fonctionne merveilleusement bien.

Mais vos chances d'obtenir ce beau, magnifique, et merveilleux jeu seront plus élevées si vous commencez par réfléchir à l'intentionnalité, les expériences que vous souhaitez faire vivre aux joueurs, comprenez qu'est ce qui fait un jeu, et comprenez le plaisir que les gens ont en jouant.

Ndt * S&P 500 : Créé par l'agence de notation financière Standard & Poor's, le S&P 500 représente près des trois quarts de la capitalisation boursière américaine. Les 500 valeurs qui composent cet indice sont sélectionnées en fonction de leur liquidité, de leur capitalisation boursière et de leur secteur d'activité.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire